Les festivités des 10 ans ne doivent pas faire oublier qu’une inscription au Patrimoine mondial est d’abord un moyen de protéger un Bien commun jugé universel et exceptionnel. Le rôle premier et sacré de la Mission est par conséquent de veiller dans la durée à la préservation des Coteaux, Maison et Caves de Champagne, en associant toutes les parties prenantes.
Un capital hérité, une valeur ajoutée
« Le Patrimoine mondial est un capital dont nous avons hérité et qui est une valeur ajoutée pour le territoire. L’inscription nous engage. À quoi ? Avant tout à le protéger pour le conserver et le transmettre. » Au nom de l’UNESCO, la Mission fait office de vigie, chargée d’observer et de prévenir toute altération qui pourrait affecter le Bien. Cela passe beaucoup par de la communication et de la médiation auprès des décideurs et des porteurs de projets.
« Le but est de provoquer une prise de conscience, de rehausser le niveau de sensibilisation et de qualité des actions à mettre en œuvre. Il ne s’agit pas de fermer la porte à la modernité, de muséifier la Champagne qui doit rester vivante, se développer, se décarboner, mais de prendre des précautions pour que tout élément nouveau dans le paysage soit compatible avec la Valeur Universelle Exceptionnelle (VUE) du Bien. » En lien étroit avec les experts du Conseil scientifique, Francisco Andrade, Directeur d’études à la Mission, suit de près les pressions que subit le territoire, alerte, accompagne et conseille.
Trois niveaux d’intervention
Le suivi réactif : quand elle a connaissance de projets d’aménagement ou d’implantation à risques, la Mission interpelle les acteurs concernés, met son grain de sel dans la discussion, fait valoir ses arguments, sans méconnaître l’intérêt économique et social que ces projets peuvent présenter.
L’alerte : quand un projet menaçant l’intégrité du Bien est déjà lancé, la Mission s’emploie à peser sur les choix faits, à mettre en place des évolutions correctives.
La stratégie amont : au moment de l’instruction d’un projet, une collectivité peut solliciter la Mission si elle a du mal à se positionner par rapport à lui. « En l’absence de CAUE (Conseil en Architecture, Urbanisme et Environnement) sur le territoire (sauf dans l’Aisne), les collectivités nous reconnaissent comme expert global sur les questions du patrimoine et du paysage. Nous les aidons à se déterminer et, si besoin, à faire évoluer le projet, à chercher d’autres pistes en instaurant parfois un dialogue avec le porteur de projet. » La démarche peut intervenir en amont, dès l’élaboration des documents de planification où certaines orientations peuvent être intégrées.
Les chartes
« Dans notre mandat d’animateur de gestion du Bien, nous avons le rôle de faire appliquer des principes sans qu’ils soient un droit opposable. À la place, nous devons justifier et convaincre. C’est pourquoi nous les avons transcrits sous forme de chartes : éolienne, photovoltaïque, méthanisation. C’est un moyen d’apporter des éléments de compréhension, de diffuser plus largement les attentes en matière de protection le plus en amont possible des projets. »
Le dialogue
En matière d’éoliennes par exemple, la Champagne viticole a beaucoup « donné » : la moitié des éoliennes de la région sont implantées sur la zone de vigilance qui entoure le Bien. Bien avant l’inscription en 2015, l’UNESCO avait pointé le risque d’impact sur le Bien que peuvent constituer les aérogénérateurs de grande hauteur, demandant à la Champagne de s’en protéger. Une inquiétude à nouveau formulée en juin 2023. Le plus souvent, la Mission dialogue avec les développeurs, travaille en bonne intelligence avec les services de l’Etat, les partenaires, l’interprofession du Champagne, les collectivités pour trouver des solutions acceptables par tous. Dans des cas extrêmes, les affaires se dénouent par la voie contentieuse, la Mission essayant de peser jusqu’au bout au nom de l’intérêt supérieur de la sauvegarde du Bien dont l’Etat français est le garant.
L’avenir
La Mission sait, comprend et confirme que la Champagne a besoin de réussir sa transition écologique. « Ces projets sont importants pour la décarbonation et la compétitivité. Ils doivent juste s’adapter au territoire pour aboutir à des réalisations dont la Champagne peut être fière. » La Mission elle-même est actrice de cette transition. Ses interventions sont positives non seulement pour les paysages inscrits au Patrimoine mondial, mais aussi pour la biodiversité, la santé humaine, la durabilité de la Champagne. Francisco Andrade : « Il faut être conscient de ce que l’inscription apporte et de ce qu’elle exige. C’est moins pour le temps présent que nous œuvrons que pour les générations futures afin de leur transmettre cet héritage exceptionnel. »
Retrouver toutes nos chartes de recommandations sur notre site rubrique médiathèque (faire lien : https://www.champagne-patrimoinemondial.org/mediatheque/ressources )
